La tour Bretagne

La tour Bretagne

La Tour Bretagne, une histoire nantaise

Par Loïc Abed-Denesle, Journaliste / Pôle Transmédias, Direction Générale à l'Information et à la Relation au Citoyen de la ville de Nantes qui a été le conférencier du déjeuner culinaro-culturel du 19 octobre 2017 de l'Institut Edouard Nignon au restaurant Vue du monde.

On a l'habitude de dire qu'elle est "la plus haute tour de New York à La Défense". Inaugurée le 18 novembre 1976 dans l'euphorie verticale des années 60-70, elle sera longtemps mal aimée. Depuis 40 ans, la Tour Bretagne règne sur Nantes. Et s’est imposé comme un emblème de la ville.

Sommaire

1 Historique
1.1 Le projet
1.2 La réalisation
1.3 Un semi-échec économique
1.4 Faits marquants

2 Architecture

3 Situation actuelle et projets
3.1 Le Nid
3.2 L’affaire de l’amiante

1/ Historique

Le projet

Le quartier de la place Bretagne, autrefois faubourg du Marchix, considéré avant la Seconde Guerre mondiale comme insalubre et dangereux, a été très endommagé lors des bombardements alliés sur Nantes, notamment ceux de Septembre 1943.
Son réaménagement commence par la construction autour de la place de deux immeubles jumeaux, toujours existants, qui abritent la Poste centrale de Nantes, la Trésorerie générale et la Caisse primaire de Sécurité sociale.

Ce projet de tour est intégré au plan de réaménagement de la place Bretagne, dirigé par Michel Roux-Spitz, au cours des années 1960, après que Nantes a été classée parmi les «métropoles d’équilibre» du pays. La tour Bretagne devait représenter la puissance économique de la ville et être une de ses nouvelles vitrines.

La réalisation

Entre 1966 et 1968, l'architecte Claude Devorsine et l'ingénieur-conseil Marcel André, conçoivent un bâtiment devant s'élever sur une parcelle trapézoïdale, présentant un dénivelé de 15 mètres. En 1968, l'idée est de construire un immeuble comportant :

  • un parking, réparti sur six étages et doté d'une station-service, auquel les voitures accéderaient par une rampe extérieure et dont l'accès pourra se faire soit depuis la place de Bretagne, soit depuis la place du Cirque ;
  • un vaste centre commercial, implanté aux trois niveaux immédiatement supérieurs, et comptant 25 boutiques, ainsi qu'un restaurant self-service ;
  • des bureaux dans l'ensemble des étages au-delà ;
  • une terrasse accueillant un restaurant panoramique de 200 mètres carrés.

En 1969, un groupe de promoteurs nantais se constitue pour gérer la partie immobilière du projet.
Les travaux commencent le 30 septembre 1971, après de nombreux retards. Alors qu'initialement la mise à disposition est prévue pour l'été 1974, la difficulté d'obtention des agréments en matière de sécurité et d'urbanisme, et les modifications de plans imprévues retardent la livraison de la tour. Elle est inaugurée en 1976, après cinq ans de travaux.
Quelques chiffres : 5 ans de travaux ; 144 m de haut ; 80 000 tonnes de béton et d’acier ; 41 niveaux dont 32 de bureaux et espaces occupés et 6 de parking ; 16 000 m² de superficie totale ; 8 ascenseurs et 7 escalators.

Un semi-échec économique

À l'achèvement de la tour, dix ans après le lancement du projet, les mentalités ont changé, et le bâtiment est perçu plutôt négativement. Il représente pour certains le symbole d'un urbanisme inadapté à la forme de la ville de Nantes, et une aberration dénaturant le patrimoine ancien. La tour est inaugurée l'année de la sortie du film catastrophe La Tour infernale.

« Erreur », « symbole de l’arrogance de l’argent » : journaux et livres regorgent de jugements négatifs sur la Tour Bretagne.
Julien Gracq la voit : «plantée toute seule agressivement comme le pieu de Dracula au coeur de cette ville vampirique». La Tour n’est pas un grand succès. En effet, elle reste longtemps à moitié vide en raison du coût élevé de ses loyers. Les suicides depuis la terrasse entraînent la fermeture du restaurant du 29e étage. Aucun commerce ne s'installe dans la base de la tour, comme il était initialement prévu. Cette aventure cause des difficultés à nombre de ses promoteurs.

Pour remplir ses 16 300 m2, dont 3 060 m2 de commerce, dotés de 350 places de parking, la mairie et des administrations décident alors d'y installer des services. Fin 2012, les étages de la Tour Bretagne sont ainsi principalement occupés par les services administratifs de Nantes Métropole et ceux de l'Unité territoriale 44 de la DIRECCTE (anciennement Inspection du travail de Loire-Atlantique). Le Centre de Communication de l'Ouest (CCO) et leConseil de développement de Nantes Métropole occupent une partie du rez-de-chaussée. Parmi les autres occupants de la Tour figurent l'ESPI (École supérieure des professions immobilières), l'ANCI (Agence nationale de communication et d'information du groupe La Poste), un cabinet d'assurances et une étude notariale.

Faits marquants

  • Le 22 septembre 2009, une vitre se brise au 12e étage et tombe sur le toit du parking et sur la voie publique sans faire de victime. La raison invoquée est un problème de variation de température.
  • Les 12 et 13 décembre 2009, en parallèle du Sommet de Copenhague sur le climat, l'association «Et si on s'activait» utilise la Tour Bretagne comme support géant. On peut alors lire sur toute la longueur et sur les quatre faces les mots : WE CAN ACT NOW («nous pouvons agir maintenant»).
  • Le 1er décembre 2012, un homme saute en parachute depuis le 32e étage.
  • Le 23 novembre 2014, 40 tonnes de matériel sont héliportées sur le toit de la tour afin de remplacer le système de climatisation.

2/ L’architecture

La base de la tour, une structure complexe

Construite sur une surface de 1 800 m2, elle prend appui entre la place du Cirque et la place de Bretagne, l'écart d'altitude entre les deux esplanades étant de 15 m. L'architecte a tiré parti de la forte déclivité du terrain pour laisser libre cours à une forme de fantaisie, soulignée par le contraste avec les formes géométriques simples de la tour elle-même.

Des premiers projets de 1964 à l’ouverture du chantier en 1971, jusqu’à l’achèvement en 1976, l’architecte Claude Devorsine et l’ingénieur Marcel André résolvent les difficultés de fondation et de stabilité sur un sol hétérogène, rocher d’un côté, vase de l’autre.

La place donnée à l’automobile

Cette base est constituée de trois rez-de-chaussée. Tout autant que l'immeuble, cette partie tranche avec l'architecture alentour. Le lien avec l'espace alentour est, à l'origine, la place donnée à l'automobile. Lors de la construction de la tour, le cours des 50-Otages est parcouru par neuf voie de circulation parallèles, configuration rendue possible par le comblement de l’Erdre, réalisé une quarantaine d'années auparavant. Une large place est donc donnée à un garage pour voitures, sur plusieurs niveaux, et dont l'accès se fait en empruntant une rampe ayant l'aspect d'un toboggan. Ce ruban extérieur apporte des courbes à l'ensemble, la base a des allures de corolle.

Le saviez-vous ?

Il n’y a pas plus haut en Loire-Atlantique. Avec ses 144 mètres, c’est la quatrième tour de bureaux la plus haute de France, hors région parisienne. Mais surtout, la Tour Bretagne est le point culminant de la Loire-Atlantique ! Devant le terril d’Abbaretz, cette colline de résidus miniers, située au nord du département.

Il y avait deux boîtes de nuit. Aux débuts de la Tour, il y en avait une en bas et une en haut ! Après l’échec de l’installation de commerces, les deux lieux ont très vite fermé.

Il faut un mois pour laver toutes ses fenêtres. Une fois par an, deux employés s’attaquent au nettoyage des 3.000 vitres de l’édifice, à l’aide d’une grande nacelle. L’opération prend environ un mois : pendant cette période, les grilles du bar terrasse Le Nid, au 32e étage, sont démontées pour faire passer le matériel, ce qui en neutralise certaines parties.

La tour est remplie à 90 %, assure-t-on au syndic de copropriété.

Le système des ascenseurs est complexe. Il y en a 8 au total, mais ils ne vont pas aux mêmes endroits : la moitié monte directement au 13e étage, puis dessert tous les niveaux jusqu’au 32e. Sans oublier qu’un ascenseur est dédié au Nid quasiment en permanence, qui attire 300.000 visiteurs par an, c’est plus de la moitié de la fréquentation du site.

3/ Et aujourd’hui en 2017?

La tour a la particularité de posséder six étages de parking, trois rez-de-chaussée devenus, les niveaux 0 - 1er et 2e lors de la renumérotation des étages en 2009. Cela pour supprimer les étages appelés RC 1 - RC 2 et RC 3 qui étaient à l'origine desservis par les escalators.

Le niveau zéro (qui se situe à vingt mètres au-dessus du Cours des 50-Otages) est surmonté de trente deux étages de bureaux et par 2 étages techniques.

Les Nantais, après avoir longtemps décrié son aspect rigide et monolithique, semblent désormais l'avoir acceptée. On peut en juger par sa présence sur un certain nombre de cartes postales, ou par son intégration nouvelle dans les circuits touristiques du Voyage à Nantes, l’opérateur de la collectivité qui porte le volet de Nantes et de la métropole.

Le Nid

Le 15 juin 2012, la terrasse du 32e étage est rouverte au public après plus de 10 ans de fermeture. Elle accueille l’œuvre du plasticien nantais Jean Jullien, représentant le nid d'un volatile. Le bar fait miroir à cette création et accueille le public et les clients dans des sièges en forme de coquilles d’œufs, à près de 120 mètres d'altitude, sous l’œil bienveillant d'une gigantesque cigogne. La terrasse, rénovée et sécurisée, offre quant à elle un panorama à 360° sur la métropole et ses alentours. Sûrement le plus beau belvédère pour découvrir Nantes et le Pays nantais.

L’affaire de l’amiante

La tour Bretagne abrite 800 personnes, des fonctionnaires de la DIRECTE et des Finances publiques, mais également le Crédit Lyonnais ou encore le CCO, le Centre de Communication de l'Ouest. Et des services de Nantes Métropole.
C’est la société en charge de l'entretien des locaux de la Direction du travail qui s'est alarmée en février dernier de la présence de poussières suspectes sur des clapets de désenfumage. Les prélèvements effectués ont alors mis en avant la présence de poussière d'amiante à des taux largement supérieurs à la limite légale au 10ème étage de la tour. Aux 20ème et 21ème étage des poussières suspectes ont également été un temps retrouvées.

Une première opération s’est déroulée en août dernier, du bas du bâtiment vers le haut. Les étages, propriété de la Direccte (du 4e au 9e), ont donc été les premiers concernés.

Elle sera de nouveau en chantier en 2018.

Le conseil syndical de la tour Bretagne s’est en effet penché le 12 septembre dernier sur le plus gros des travaux à venir : le remplacement pur et simple des volets en question.

Montant global des travaux : 300 000 € cette année / 1,6 million en 2018

La tour Bretagne

Restaurant Vue du Monde

La tour Bretagne

Poisson à la criée, sauce lait de coco et curry, Crémeux panais gingembre

La tour Bretagne

Assiette de fromage et sa variation de pain

La tour Bretagne

Gâteau Nantais

La tour Bretagne

Photos : François Kammerer